Marathons 67/100 : 55 km, (Edirne – Babaeski)
Ce matin à 6h, je me suis dit, c’est peut-être celui-là qui va détraquer la machine.
55 km quasiment constamment sur la 2 fois 2 voies sous les 40 degrés et sans ombre. Je me suis vu penser, je ne pense pas que ce soit possible.
Pourtant il m’en faut…
D’autant que je découvre que j’ai chargé mon téléphone sur une prise sans courant.
Que le premier kilomètre m’a ramené à 100m de l’endroit où j’ai dormi, qu’il n’y a plus d’expresso sur la route et plus de wifi dans les bars pour lire le journal et me motiver avec vos commentaires…
Alors je passe les 2 premières heures à chercher le sens de ce que je fais. Faire une performance ? Bof. Atteindre Jérusalem ? Et après ! Non j’espère que ça change quelque chose à ce monde dans lequel je vis. Mais comment pourrais je le savoir ?
Et puis je finis toujours par conclure comme cela : tu n’as pas à savoir les effets. Tu dois continuer tant que tu sens que c’est le chemin qui est le tien. Tu n’as pas à savoir les effets. Fais nous confiance pour tout ça.
Ainsi, après ces longues heures à profiter de la vitamine D, quand je suis arrivé à 14h30, j’avais les tendons en feu. Madonna aurait pu utiliser ses meilleurs atouts, j’aurais déclaré forfait, mais j’ai crié d’une joie sans précédent en atteignant le panneau de la ville.
Je fais un peu court. Vraiment besoin de récupérer. Demain du coup, ce sera bien moins long, mais les 2 suivants seront exigeants encore. Bien que je compte sur une légère baisse de la température.
Sinon, le café turc, c’est un café où tu manges autant que tu bois. J’en ai mangé un quart et effectivement, j’ai bien senti l’intérêt de la caféine à croquer.
Je suis l’attraction dans les bars. Il faut imaginer que je suis mal à l’aise d’être au centre de l’attention. Donc je m’habitue doucement à partout où je vais, on observe les mouches voler et moi et ma tête se demandant s’ils attendent que je fasse une blague en turc.
Ah si et trop sympa. Il y a eu David qui est venu s’asseoir avec moi. 60 ans et un sourire d’enfant. On se comprenait pas bien mais il m’a demandé 4 fois, mais elle est où ta voiture ?
Et waouh les mosquées. Je ne sais pas si on peut se rendre compte sur les photos. Mais c’est rond comme le ventre de nos mères. La moquette est partout. On rentre quand on veut. Certains s’assoient et passent leurs coups de fils. C’est pas mon église mais j’adore l’ambiance. Bien qu’il y ait un gars bruyant pendant mes siestes.
D’ailleurs, en parlant de ça, du ventre rond de nos mères, demain c’est l’anniversaire de la mienne. Est-ce qu’on peut offrir un marathon ?
Antoine VERNIER, sociologue, vit à Angers dans une cabane sans eau et sans électricité.
En 2022, il court 23 marathons de suite jusqu’à Davos. De ce voyage, il réalise un documentaire « Et si on parlait d’amour !? » et en écrit un livre qui porte le même titre.